Crédit photo : NP/Newestpost/Tada Images - Image d'archives du siège social d'Uber à San Francisco (USA)
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Emmanuel Macron : a-t-il aidé Uber à s’implanter ?
Des milliers de documents internes au géant américain, Uber, révèlent notamment que l’entreprise aurait bénéficié de la bienveillance et de l’appui d’Emmanuel Macron lorsqu’il était au ministère de l’Économie, avant son élection en 2017.
Uber est dans la tourmente, après la révélation par un Consortium international de journalistes de pratiques à la limite de la légalité entre 2013 et 2017. Dans les faits, des milliers de documents internes au géant américain révèlent notamment que l’entreprise aurait bénéficié de la bienveillance et de l’appui d’Emmanuel Macron.
L'actuel chef de l'Etat français a-t-il usé de ses fonctions de ministre de l'Economie, et de son pouvoir pour favoriser l'implantation de Uber en France ? Selon ces documents, oui, alors même qu’il n’était pas en charge du dossier des transports.
A l'époque, Emmanuel Macron s'intéresse notamment à la loi Thévenoud, censée réglementer l’activité des VTC en France. C’est dans ce contexte que quatre personnages de la direction d’Uber sont invités à Bercy, le patron, Travis Kalanick, le vice-président du groupe, David Plouffe, Pierre-Dimitri Gore-Coty, directeur d’Uber pour l’Europe de l’Ouest, et Mark MacGann, connu comme lobbyiste.
La durée de formation des chauffeurs
La rencontre n'est pas inscrite à l'agenda de l'ancien ministre de l'Economie, mais rapidement les représentants de la société américaine écrivent dans un compte-rendu interne leur satisfaction d’être sur la même ligne que Bercy.
Principale difficulté liée au déploiement d'Uber, en France, la loi "Thévenoud", donc, prévoyant notamment une durée de formation des chauffeurs. Un frein à l’expansion de l'entreprise américaine, alors qu'elle est déjà dans le collimateur de la répression des fraudes.
C'est là qu'interviendrait Emmanuel Macron. Dans un message adressé aux patrons d’Uber, Travis Kalanick et David Plouffe, le 17 novembre 2014, Mark MacGann affirme que l'ancien ministre de l'Economie s’est engagé à intervenir auprès de la DGCCRF, la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes.
Les milliers de documents récupérés par le journal britannique The Guardian, et partagés avec le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses partenaires, montrent ainsi qu'Emmanuel Macron aurait au minimum plaidé, notamment au sein du gouvernement, pour un allègement de la réglementation qui encadre les plateformes VTC.
Par exemple, dans un document d’Uber, la direction du géant américain résume le "plan" qui aurait été élaboré avec le ministre de l'Economie : "Nous nous sommes mis d’accord avec Emmanuel Macron sur un process en deux temps :
Proposer un ou plusieurs amendements à la loi Macron avant demain soir afin de modifier la réglementation actuelle introduite par la loi Thévenoud.
Et, ouvrir une fenêtre de 4 semaines pour mener une campagne de communication avec Macron afin de faire accepter l’idée qu’une licence VTC "light" serait une solution pour l’emploi et la mobilité. Dans ce contexte, il s’agira de trouver le moment opportun pour rédiger un décret abolissant le régime proposé par la loi Thévenoud et introduire une réglementation plus souple."
Dénouer certains "verrous"
Emmanuel Macron est également cité dans le cadre d'une perquisition menée par les services fiscaux au siège d’Uber France, le 6 juillet 2015. Selon les documents révélés par le consortium de journalistes, un lobbyiste d'Uber a demandé à l'actuel président d’"intervenir" car Alexis Kohler, ex directeur de cabinet à Bercy, ne répondait pas à son SMS.
En réponse, le service de presse de l’Élysée affirme que les fonctions passées d’Emmanuel Macron "l’ont naturellement amené à échanger avec de nombreuses entreprises engagées dans la mutation profonde des services advenue au cours des années évoquées, qu’il convenait de faciliter en dénouant certains verrous administratifs ou réglementaires".